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Prendre la mer





🌊 Prendre la mer, c’est forcer l’ouverture des possibles, au croisement de la pulsion de vie et de la pulsion de mort. Les plus grands aventuriers n’ont eu cesse de le faire, et les migrants de nos jours embarquent parfois sans arriver. Comme les nombreux Cubains qui ont joué leur sort à la roulette russe en voulant rejoindre Miami bien avant eux.


L’on prétend parfois que l’eau - tout comme Dieu - protège les gentils et punit les méchants. Moïse est ainsi sauvé des eaux, fait surgir une source en tapant sur un roc avec son bâton et sauve son peuple en ouvrant la Mer Rouge avant de la refermer sur l'armée du pharaon. Miracle ultime, il rencontrera sa future épouse, Sephora, près d’un puits. D’un côté il y a ça, et de l’autre il y a Lampedusa. La mer demeure un des plus grands mystères.


C’est sans doute la raison pour laquelle l’eau, Julia Kerninon s’en méfie; elle est tempête, ouragan, raz-de-marée, il s’agit d’éviter le naufrage, la dérive, la noyade. Toucher la terre ferme à tout prix, avant qu’il ne soit trop tard. Un bébé est parfois cela : une naissance en forme de longue traversée avant de pouvoir renaître soi-même. La peur de ne pas être à la hauteur avant de pouvoir à nouveau respirer.


Toucher la terre ferme est un roman d’intérieur comme je les affectionne. Comme l’autrice de Liv Maria, j’aime les récits intimes; pour moi l’intimité est le meilleur moyen d’atteindre l’universel. On part des petites choses de nos existences, on les “médiatise” suffisamment pour que le voyeurisme et l’indécence ne soient pas de mise, et on les porte aux yeux du monde pour provoquer de façon un peu mystérieuse des résonances insoupçonnées.


Chère Julia Kerninon bonjour, je ne vous connais pas, mais j’ai reconnu votre plume. Je suis comme vous plutôt impudique, nous faisons de la littérature et la littérature nous le savons bien est le lieu de la totale vérité, nulle place ici pour une quelconque retenue mal placée, ce qui doit être écrit doit être écrit, ce qui ne peut pas se dire aussi, qu’on se le dise !


Qu’on se dise aussi que l’amour ce n’est pas les roses, les chocolats et les cartes niaises aux couleurs plus clinquantes les unes que les autres. “Car l’amour et la douleur sont une seule et même chose, et la valeur de l’amour est la somme de ce qu’il faut payer pour l’obtenir, et chaque fois qu’on l’obtient à bon compte on se vole soi-même”. Voilà l’amour, c’est William Faulkner qui l’écrit dans le livre de Julia Kerninon. Un rappel très à propos en ce jour de Saint Valentin… ♥️


O. V.


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